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BILLET D'HUMEUR

Il faut que vous écoutiez...

que vous entendiez

et… peut-être que vous

compreniez.

Je suis un noyé que l’on a sauvé de la

noyade pour ensuite l’étouffer sur la

berge. Tout a commencé banalement:

unmalaise, une visite dumédecin, des

consultations chez des spécialistes.

Un long congé de maladie. La fin de

mon contrat de travail. Des analyses

et des examens. Tout allait bien pour

moi: la santé et pas de crédits. Tout va

mal maintenant: malade et sans boulot.

Davantage de frais de santé malgré les

remboursements de ma mutuelle et

moins d’argent malgré le chômage.

Je me dis:

«Aie confiance

en toi, en la médecine

et en la société!»

Une consultation chez le chirurgien:

une opération lourde suivie d’un long

traitement avec des médicaments, autre-

ment, des souffrances atroces et une fin

proche. «

A vous de décider!

» qu’il dit.

Pas vraiment le choix mais je ne suis pas

idiot: une opération et un traitement:

ça coûte et je n’ai pas d’argent; j’ai même

dû arrêter mon assurance hospitalisa-

tion. La vie n’a pas de prix, dit-on. La

mienne en a un que je ne peux payer.

Mais je n’ai rien dit!

L’ acompte à l’entrée de l’hôpital a vidé

mon compte en banque. L’ opération:

des complications, une hospitalisation

plus longue, beaucoup de soins. Mieux

dans mon corps, mal dans ma tête: je

savais que la facture serait salée.

M’enfuir ? J’ y ai pensé souvent mais je

n’étais pas en état. Les services sociaux

de l’hôpital? Déjà humilié d’être un

parasite sans travail, je ne pouvais

accepter d’être en plus un assisté.

Orgueil mal placé ou un

reste de dignité?

Le silence honteux d’unmauvais payeur

plutôt que les intrusions bureaucra-

tiques des assistants sociaux.Alors,

je n’ai toujours rien dit; alors, je n’ai rien

fait non plu ! Sorti de l’hôpital, vint la

facture…énorme... tellement que ce que

j’aurais pu payer par mois aurait mis des

années pour la solder. Inutile donc de

demander des facilités de payements à

l’hôpital: onm’aurait ri au nez. Rendu

à la vie par les médecins, j’allais devoir

faire le mort.

Je n’ai toujours rien dit!

Un recommandé. Une audience au

tribunal. Une justice qui me suspecte

de ne pas vouloir payer. Un juge qui me

fait la morale : si tout le monde faisait

comme vous…un jugement avec des

amendes et des frais de justice qui

me condamne à des mensualités trop

lourdes pour mes revenus même en

arrêtant les médicaments du traitement

pourtant indispensables. Les médecins

m’ont rendu l’espoir de la vie, je re-

tourne au désespoir de vivre.

Alors, il n’y a rien à redire!

Un coup de sonnette à la maison:

le huissier avec un commandement à

payer dans les 24 heures : onme prend

encore pour un tricheur si on croit qu’en

un jour, je peux avoir l’argent que je n’ai

pas depuis des mois. Demain, la saisie:

je subirai jusqu’au bout…

Tout est dit !!!

Je n’avais qu’à parler avant, je n’avais

qu’à avouer ma détresse… J’aurais dû

mettre de côté ma fierté d’homme déjà

bien agressée par la maladie.

J’aurais dû renoncer à ma dignité

d’homme déjà bien dégradée par

les souffrances. Je n’avais qu’à…

et j’aurais dû…mais je n’ai pas pu,

je n’ai pas su…Suis-je donc si coupable?

Et coupable de quoi? De négligence?

Pourtant j’ai fait mon possible pour

payer ma dette à la société. De naïveté?

Sans doute en croyant que, même sans

rien dire, la société verrait, compren-

drait et adoucirait ma situation.

La mort d’un abruti est

la survie d’un vautour.

Proverbe Comorien

Georges Larbuisson

Je me suis tu...

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longtemps, trop longtemps.

Il faut que je parle, que je dise…

que je me raconte…