Jeûner, c'est bon pour la santé ?

10 ALIMENTATION : UNE ALTERNATIVE ? Selon ses partisans, le jeûne contribuerait au maintien d’une bonne santé, au même titre qu’une alimentation saine et un exercice physique modéré. Qu’en est-il vraiment ? « Même s’il a été récemment popularisé par les influenceurs et les réseaux sociaux, le jeûne est une pratique ancienne, intégrée à plusieurs religions, chrétienne, musulmane et hébraïque en tête. Elle véhicule, dans ce cas, une certaine idée de purification », remarque le Professeur Nicolas Paquot, Chef du service Diabétologie, Nutrition et Maladies métaboliques au CHU de Liège. Bien que le terme recouvre plusieurs types de cures et de jeûnes, on distingue essentiellement le jeûne complet et le jeûne intermittent. Au cours d’un jeûne complet, seule l’eau est permise. Le jeûne intermittent est plutôt basé sur diverses diètes et/ou une alimentation « à temps partiel ». « En règle générale, on parle d’un apport énergétique contrôlé, légèrement diminué », souligne le Pr. Paquot. « On remarque, en laboratoire, qu’une cellule plongée dans un bain nutritionnel se divise davantage quand elle reçoit un apport énergétique moindre. Cela vaut aussi pour les vers et les rats, voire les primates, dont la survie est plus longue suite à une restriction calorique modérée et prolongée: ils développent moins de maladies liées à l’âge. » Pour autant, les vertus du jeûne en laboratoire sontelles transposables à l’être humain ? TOUT, ET SON CONTRAIRE « On peut di" cilement mener ce type d’expérience avec l’Homme. Cependant, certaines populations vivent un peu de cette manière. Les habitants d’Okinawa (Japon), par exemple, entretiennent des habitudes alimentaires relativement proches. Ils ont, depuis des générations, une alimentation essentiellement végétale, une activité physique importante, et une restriction calorique relative. Ils développent beaucoup moins de maladies liées à l’âge (cancer, maladies cardiovasculaires et neurodégénératives) que la population générale, et le nombre de centenaires y est plus élevé qu’ailleurs. Même si on lit tout et son contraire concernant le jeûne, on peut en déduire que les restrictions caloriques sont favorables à un certain nombre de choses. Mais l’essentiel reste, à mes yeux, de respecter certaines périodes dans la journée où l’on ne mange pas, de manière à favoriser le processus d’autophagie. » Soit le nettoyage des protéines et des cellules, plus compliqué en cas de grignotage compulsif, qui favorise la sécrétion d’insuline. « Le jeûne prolongé permet également la production et l’utilisation de corps cétoniques, qui dérivent des lipides stockés dans les cellules adipeuses. Autrement dit, plutôt que de consommer du glucose, le corps va puiser dans ses réserves de graisse. Au-delà de cela, aucune étude sérieuse n’a encore prouvé les bienfaits sur le long terme d’un jeûne complet (pendant plusieurs jours) ou intermittent, pour le corps humain. Ce qui fonctionne in vitro et en expérimentation animale n’est pas toujours transposable au quotidien », conclut Nicolas Paquot. F.Si. Jeûner, c’est bon pour la santé? PR. NICOLAS PAQUOT Chef du service Diabétologie, Nutrition et Maladies métaboliques Les habitants d’Okinawa (Japon) ont, depuis des générations, une alimentation essentiellement végétale, une activité physique importante, et une restriction calorique relative.

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