Les TOC, ces "petites manies" irrépressibles

Chirurgie anti-TOC : la stimulation cérébrale profonde 2 à 3 % des patients atteints de TOC sévères ne répondent à aucun des traitements habituels. Pour ceux-là, la neurochirurgie offre un espoir de retrouver une vie normale, grâce à une technique de neuromodulation qui permet de moduler certaines activités du cerveau. Explications. La technique n’est pas neuve: on utilise la stimulation cérébrale profonde depuis plusieurs dizaines d’années pour traiter des pathologies tellesque lamaladiedeParkinson, des tremblements, les dystonies ou encore l’épilepsie.Depuis lafindesannéesnonante, on sait que cette chirurgie permet aussi de soigner les TOC! Comment? «En envoyant un courant à haute fréquence dans les zones du cerveau liées à l’alarme, pour freiner leur suractivation et ainsi diminuer l’anxiété », explique le Pr. Scantamburlo. Concrètement, «on implante deuxpetites électrodes au centre du cerveau, reliées à un boîtier placé dans l’abdomenouauniveaupectoral etmuni d’unepile (le neurostimulateur), qui fournit le courant ». Dans le cadre du TOC, cette intervention est réalisée sous anesthésie générale et les patients restent en moyenne hospitalisés une petite semaine. Naturellement, «cette interventionest réservée auxTOCtrès sévères, qu’on ne parvient pas à soulager avec les traitements classiques ». COMPARABLE À UN PACEMAKER, LE DISPOSITIF EST ENTIÈREMENT RÉVERSIBLE Si cela peut paraître impressionnant, «le dispositif fonctionne exactement comme un pacemaker », explique le Pr. Didier Martin, chef du Service de Neurochirurgie. «Tout le dispositif est placé sous la peau. Peu visible, il permet les activités de la vie quotidienne et même lapratique de sport. Par lamise enplace d’électrodes au sein de régions spécifiques du cerveau, cette chirurgie module l’activité de certains circuits neuronaux. On agit sur la fonction et non en enlevant une lésion ». Avec cet immense avantage que «l’intervention est entièrement réversible », précise le Dr Anne-Laure Salado qui, avec le Dr Bruno Kaschten, sont les deux neurochirurgiens qui réalisent ces interventions au CHU de Liège. Quant aux risques de complications, «ils sont très rares, les deux risques principaux étant les infections et les hématomes ». POUR QUELS RÉSULTATS ? La stimulation cérébrale profonde permet d’atténuer les symptômes duTOC, «plus ou moins selon les patients. Beaucoup se sentent enfin revivre, mais on ne guérit jamais tout à fait », prévient lePr. Scantamburlo. Il rappele que «les TOCvarient au cours des événements et des périodes de vie, qui influent sur l’anxiété ». D’où l’intérêt d’undispositifmodulable: «Onpeut adapter les paramètres ducourant de façon personnalisée, en fonction du patient et de l’évolution de ses symptômes, tout au long de sa vie ». Jen D. LE CENTRE DE RÉFÉRENCE TOC AU SART TILMAN En Belgique, seuls cinq Centres de référence sont habilités à pratiquer des chirurgies de stimulation cérébrale profonde pour le traitement des TOC : l’UZ Genk, l’UCLouvain, la KULeuven, le CHU de Charleroi et… le CHU de Liège, qui a développé depuis quelques années un Centre de référence TOC associant les Services de Psychiatrie et de Neurochirurgie pour proposer aux patients une consultation mixte. ANNE-LAURE SALADO Neurochirurgienne DIDIER MARTIN Chef du Service de Neurochirurgie quand le doute devient UNE MALADIE 03

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