Solidarité au CHU pour l'Ukraine

08 JEUNES PATIENTS| OSER S’EXPRIMER Ils ont entre 6 et 11 ans et se retrouvent, pour un temps, «coupés du monde, déracinés». Les petits patients d’hémato-oncologie en attente d’une gre e pourront compter, dès l’été, sur leur carnet «En bulle», pour accompagner leur parcours de combattants courageux. Deborah Sutera, éducatrice, Sophie Servais, hématologue et Françoise Franchi, responsable de l’hôpital de jour en onco-hématologie, portent le projet depuis 3 ans. «Nos patients suivent un parcours extrêmement long et difficile : pendant minimum un an, ils sont privés d’école, subissent des traitements lourds, se retrouvent isolés à l’unité stérile, sans plus aucun contact avec l’extérieur », explique Françoise Franchi. « L’idée est née de leur permettre de se retrouver au centre de leur prise en charge, et d’exprimer leurs émotions au travers d’un carnet, quand ils ne peuvent parfois plus les exprimer autrement. » Imaginé en équipe, traduit en dessins par l’illustratrice Marie Deprez, soutenu par le Professeur Yves Beguin, « En bulle » n’est ni un carnet médical, ni un cahier de liaison entre deux unités de soins. « C’est avant tout la propriété de l’enfant. Pour des raisons médicales, il ne peut lui être remis que neuf, en unité stérile, si on veut qu’il l’accompagne ensuite au gré des étapes de son traitement. Il pourra y noter ses bons comme ses mauvais souvenirs, ses difficultés, se moquer des équipes ou de certaines situations, y coller des photos, mais aussi y trouver de quoi mettre des mots sur ses émotions, et des armes pour franchir chaque étape. Il pourra également, s’il le souhaite, le partager avec un adulte de confiance, par exemple. Et le retrouver plus tard, quand ces moments difficiles seront derrière lui », souligne Deborah Sutera. Parcouru par une Tribu de petits personnages neutres, fantasques et bienveillants, ce carnet d’émotions a reçu le soutien financier du Fonds Euroma, de la Fondation Léon Frédéricq, de la Fondation contre le Cancer et de la Belgian Hematology Society. « Très bien accueilli par tous les partenaires et collègues qui en ont vu la première ébauche – sans doute parce qu’il a été réalisé avec le cœur – il pourrait, à termes, bénéficier à d’autres centres, en Belgique et à l’étranger », se réjouit Françoise Franchi. FRÉDÉRIQUE SICCARD «En bulle», le carnet d’émotions des enfants gre és RENCONTRE AVEC MARIE DEPREZ, illustratrice «La toute première conception graphique d’un livre/cahier/carnet, c’est quand même pas rien», dites-vous. Comment l’aventure a-t-elle commencé ? C’était il y a presqu’un an: j’étais en train de réaliser une fresque de 4 mètres de haut quand Françoise Franchi m’a contactée pour me parler de «En bulle ». C’était à la fois très tentant, et très angoissant : tout à fait nouveau, inconnu, encore très abstrait… J’ai dit oui ! Comment le projet a-t-il évolué ? J’ai rencontré l’équipe avec Nathalie Biemar, l’infographiste avec laquelle je travaille généralement. Puis Deborah m’a transmis le contenu écrit : une brique ! Je l’ai ouverte sur le trajet des vacances. C’était grisant et stressant à la fois : il s’agissait de trouver de bonnes idées pour chaque page. J’ai lu le tout trois fois. La première fois, j’ai noté mes idées. La deuxième, j’ai esquissé une sorte de storyboard pour chaque page. La troisième fois, je me suis lancée dans l’illustration proprement dite. Il s’agissait de créer des personnages qui ne soient ni genrés, ni racés. J’ai donné vie à une tribu, dans laquelle chaque enfant de 6 à 11 ans peut se retrouver, se sentir accompagné. C’est un travail de longue haleine. Ce projet m’a pris beaucoup de temps et d’énergie : avant de dessiner, il faut avoir une idée, et le temps que l’on s’octroie n’est pas toujours propice à l’inspiration. Parfois, les idées naissent pendant que je conduis! Et, parce que je suis aussi institutrice à temps plein, j’y ai travaillé pendant tous les trous qu’il me restait: week-ends, soirées, congés… Comment ressort-on d’une expérience comme celle-là? Je me suis, dès le début, attachée à l’idée que la grande majorité des petits patients sortent de là guéris. Mon naturel optimiste et positif, et mon métier d’institutrice, m’ont aidée à faire la part des choses. La tribu pose sur les enfants un regard bienveillant, doux et humoristique. J’ai demandé à pouvoir rédiger, à la fin, un petit message pour les enfants. Pour qu’ils sachent qu’ils ont toujours été au centre de mes pensées. F.Si. Deborah Sutera, éducatrice, Sophie Servais, hématologue et Françoise Franchi, responsable de l’hôpital de jour en onco-hématologie

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