Les TOC, ces "petites manies" irrépressibles

10 La végétalisation des villes n’est pas qu’une lubie d’écolo ! Les études s’accumulent, démontrant que la santé humaine est intimement liée à celle de la biodiversité, souvent déficiente en zones urbaines. C’est pourquoi les habitants des « villes vertes » vivent mieux et plus longtemps que les citadins cernés par le béton…Mais la question n’est pas simple. Explications. Le Dr Nicolas Antoine-Moussiaux est Dr en sciences vétérinaires et enseigne les approches intégrées de la santé dans le Master en Sciences de la santé publique à l’ULiège Il y a tout juste deux ans paraissait la plus grande étude jamais réalisée sur le lien entre nature et santé en milieu urbain, financée par l’OMS. Durant plusieurs années, des chercheurs ont suivi par images satellite l’évolution de la couverture végétale de nombreuses grandes villes dans le monde, et l’ont comparée aux courbes de durée de vie de leurs habitants, soit 8 millions de personnes issues de 7 nations différentes. Les résultats sont sans ambiguïté. Sur une échelle allant de -1 (aucun accès à la végétation) à +1 (espace vert à proximité directe), à mesure que la note augmente d’un dixième, la mortalité est réduite de 4%. « ONE HEALTH » : PAS DE SANTÉ SANS BIODIVERSITÉ « La biodiversité est tout simplement la condition première de notre existence », rappelle le Dr Nicolas Antoine-Moussiaux. « Tout ce que l’on boit, mange ou respire, nos vêtements, nos médicaments, tout provient de la biodiversité. Même le pétrole… et même les maladies infectieuses ! ». L’humain n’existe pas indépendamment des écosystèmes dans lesquels il prend place : «Toutes les formes de vie sont liées. Toucher à un seul élément d’un écosystème aura un impact sur l’ensemble des autres éléments, et in fine sur notre santé. La santé humaine est ainsi étroitement liée à la santé animale, végétale et plus largement environnementale ». C’est ce qu’exprime le concept de «One Health » (« une seule santé ») ou « Eco-Health », suggérant notamment que pour prendre soin de notre santé, il s’agit d’abord de prendre soin de notre environnement. CONTRE LE « VERDISSEMENT BÉAT » De plus en plus de projets d’aménagements urbains intègrent des végétaux et des points d’eau pour « verdir et bleuir les villes ». «Mais il ne suffit pas de planter des arbres un peu partout », prévient le Dr Antoine-Moussiaux, « car ce n’est pas seulement une question quantitative, mais aussi qualitative », en fonction des variétés de végétaux, des espèces animales qu’elles abritent et de leur équilibre, mais aussi des spécificités naturelles, culturelles et socio-économiques de chaque zone. « Les liens entre nature et santé sont extrêmement complexes, et loin d’être complètement élucidés ». D’autant que la nature en ville peut aussi comporter quelques risques « comme l’augmentation des allergies liées au pollen ou de certaines maladies infectieuses transmises par les animaux (moustiques, tiques, Verdir et bleuir les villes : 20% des décès dans le monde sont dus à des facteurs environnementaux, soit environ 12 millions de morts par an selon l’OMS ENVIRONNEMENT| UNE MEILLEURE SANTÉ DANS LES VILLES «Verdir et bleuir» les villes peut améliorer la santé globale des habitants. C’est du moins la conclusion du rapport publié par le Conseil Supérieur de la Santé (CSS) en novembre dernier : la végétation urbaine et les points d’eau auraient demultiplese etssur notrebien-être physique, mental et même social. «Si l’on ne parvient pas toujours à expliquer clairement pourquoi, de nombreuses études montrent que le contact avec la nature procure énormément de bénéfices pour la santé, sur un plan physique aussi bien que psychique ou social. Les trois sont d’ailleurs intimement liés », entame leDr Antoine-Moussiaux. Pour que les espaces verts puissent produire un effet bénéfique en ville, il faut «qu’ils soient de qualité, bien entretenus et sécurisés, et surtout accessibles à tous ». Il s’agit surtout d’éviter l’ «éco-gentrification»: «L’inégalité d’accès à la nature recoupe en fait les inégalités socio-économiques. Il ne faudrait donc pas que les espaces verts soient concentrés dans les quartiers les plus aisés, laissant le béton aux zones plus denses et moins favorisées ». Ceci d’autant plus que les bénéfices du verdissement urbain sont beaucoup plus grands chez les populations défavorisées, observe le CSS. Notamment parce que les familles aisées disposent plus souvent d’une voiture, leur permettant facilement de s’évader à la campagne. Pour l’OMS, un espace vert devrait toujours être accessible à moins de 300 mètres du domicile. MOINSDEMALADIES CARDIOVASCULAIRES ET RESPIRATOIRES, ETUNE MEILLEURE IMMUNITÉ! L’exposition à la végétation est corrélée avec une moindre incidence de maladies cardiovasculaires, d’obésité et d’hypertension. Les espaces verts encouragent la mobilité active (vélo, marche…) et stimulent l’activité physique en plein air, la promenade chez les personnes âgées ou encore le jeu chez les enfants. Ils contribueraient globalement à un mode de vie plus sain, et même à une meilleure alimentation grâce aux potagers urbains. Selon le CSS, les espaces verts encouragent à sortir davantage. Enfin, l’exposition à la lumière naturelle procurerait un meilleur taux de vitamine D et aiderait à réguler les fameux cycles circadiens, garants d’un meilleur sommeil. À condition d’éviter les pesticides et herbicides, la végétation agit aussi comme un purificateur d’air et aide à lutter efficacement contre la pollution urbaine (encadré ci-contre), dont on connaît les dégâts sur la santé respiratoire. Par ailleurs, le contact avec la diversité microbienne en zones vertes et bleues améliorerait le fonctionnement immunitaire, en particulier chez les enfants. renards…), telles que la maladie de Lyme par exemple ». Le verdissement urbain doit donc être pensé «de façon à promouvoir les interactions bénéfiques entre la nature et la santé humaine tout en atténuant les interactions néfastes », estime le Conseil Supérieur de la Santé dans son avis de novembre dernier. Ce rapport d’une cinquantaine de pages formule une série de recommandations pratiques et dresse l’état des connaissances scientifiques belges et internationales sur le sujet. Nature en ville : quels bénéfices pour la santé ?

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