Télétravail : ne soyez pas « workaholic » !

06 12 MAI I JOURNEE MONDIALE DES INFIRMIER.E.S E ntretien avec EricMaclot, directeur duDé- partement Infirmier duCHUde Liège (1800 personnes), à propos de ces femmes et ces hommes qui contribuent tous les jours au mieux-être des patients. Voilà un peu plus d’un an, la Belgique était touchée par la première vague du Corona- virus. Une crise inattendue que les hôpi- taux ont dû affronter. Dans la peur. « Lors de cette première vague, on manquait de moyens de protection et on a donc dû affron- ter un virus méconnu sans les équipements adéquats » explique Éric Maclot. Malgré la peur, tous étaient bien présents, ne comp- tant pas leurs heures. Cette crainte, c’était celle de l’inconnu, celle de ramener ce virus au sein de son foyer, celle de ne pas tenir le coup. Et pourtant, une solidarité plus forte que jamais a émergé entre les infirmiers, les médecins, les techniciens de surfaces, les auxiliaires de soin, les assistants lo- gistiques et tous les autres membres du personnel. « Une réelle force qui a permis de traverser cette première vague » souligne le responsable du département. À la mi-octobre les hôpitaux font face à un regain de la Covid-19. Cette nouvelle vague, plus forte que la précédente, met à nouveau sous pression tout le personnel de soins. Mais tous sont présents, quitte à annuler leur congé, pour assurer leur rôle au che- vet des patients, sans oublier leur vie de famille. « Les infirmiers et les infirmières ont eux aussi une vie de famille, des maris, des femmes, des enfants et que c’est compliqué d’organiser cette vie de famille avec les res- trictions que l’on connait ». Alors que le virus continue de circuler, on observe une certaine lassitude chez les agents de terrain. Pris entre leur vocation de soigner les gens et l’impact des récents événements massifs organisés, le person- nel infirmier est fatigué de devoir trouver des solutions pour continuer d’exercer le mieux possible sans que la vie privée en prenne un coup, et ce malgré le début de la campagne de vaccination. Mais c’est aussi grâce à ces vaccins que les soignants perdent peu à peu la crainte de ramener le virus chez eux, leur permettant ainsi de profiter de moments précieux avec leurs proches. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, le taux d’absentéisme au sein du Départe- ment Infirmier n’a pas été plus important que les années précédentes. Au contraire, on a remarqué que les infirmiers étaient très présents durant toute la crise et ce malgré la peur et le stress de la situation. Ce n’est qu’en deuxième vague que les ab- sences se sont fait un peu plus ressentir : « C’était un problème de contamination qu’on a vu chez les adolescents et les enfants. Il y a donc eu des infections et des mises à l’écart de certains membres du département ». Si 2020 a été une année particulière pour tout le monde, les femmes et les hommes infirmiers ont vécu des situations inédites pour beaucoup d’entre eux. Alors que leur vocation est de soigner et de guérir les pa- tients, ils ont dû apprendre à accompagner les gens dans lamaladie et des fois jusqu’au décès. « C’est cela qui a été dur, parce que ce n’est pas une situation à laquelle nous sommes confrontés tous les jours. Parfois, il y avait deux ou trois décès sur une même journée, et c’était un choc psychologique éprouvant pour les équipes. On est là pour soigner les gens, pas pour les voir mourir » témoigne Éric Maclot. UN MÉTIER TROP PEU VALORISÉ À l’heure où lemétier d’infirmier est plus que nécessaire, on remarque qu’il n’est pas ap- précié à sa juste valeur. En effet, le personnel infirmier ne se sent pas reconnu ni entendu, et cela s’est fait énormément ressentir pen- dant la crise sanitaire. Cette dévalorisation ne reste d’ailleurs pas sans conséquence. On remarque effectivement une baisse im- portante au niveau des inscriptions pour les études d’infirmier. Et les raisons de cette diminution sont simples : « Que recherchent les jeunes dans un métier ? Une valorisation de la société, mais aussi une valorisation salariale et des perspectives d’avenir quant à l’évolution de leur carrière ». Ce sont là, exactement, les revendications des infirmiers et infirmières : une revalorisation salariale à la hauteur du travail fourni. Qui plus est, quand on sait que les études passent de trois à quatre ans, avec une spécialisation en cinquième année et un master supplémentaire qui amènerait les fu- turs membres du corps infirmier à avoir fait sept années d’études pour un salaire qui lui, à ce stade, reste inchangé. « On comprend la dé- motivation qui pousse les jeunes à se diriger vers d’autres vocations que celle d’être infirmier ». Une chose est sûre : Eric Maclot est fier de et reconnaissant envers ses équipes : « Ils ont sacrifié beaucoup de choses cette année pour être présents à leur poste et au chevet des patients. Je les remercie de tous les ef- forts qui ont été faits, de la façon dont ils ont concilié vie de famille et vie professionnelle. » Alors que la situation reste difficile sur le terrain, on ne peut qu’encourager ces hommes et ces femmes qui sont au front tous les jours. « Après toutes les choses qui ont été accomplies jusqu’à présent, celles qui se profilent sont attendues avec lassitude. Mais je leur demande de garder force et courage et de ne pas baisser les bras. Même si l’on ne voit pas encore la fin du tunnel, une chose est certaine : c’est grâce aux efforts et au travail de chacun qu’on s’en sortira. » MARTIN LEEMANS. Être infirmier : une vocation sous-estimée Une réelle force qui a permis de traverser cette première vague ERIC MACLOT Directeur du département infirmier du CHU de Liège 51 MERCIS À NOS SAGES-FEMMES ! Le 5 mai, ça sera également l’occa- sion de fêter et mettre à l’honneur les sages-femmes. Celles qui sont au chevet des jeunes parents et des nouveaux nés qui, durant la crise sa- nitaire, ont dû apprendre à adapter leur métier, non sans difficulté. « Il fallait pouvoir gérer les visites, les patients covid et les nouvelles nais- sances. Ça n’était pas une mince affaire, explique Éric Maclot. Elles ont géré ça de main de maître(esse). Je suis très fier d’elles et je tiens vraiment à les remer- cier pour tout le travail abattu. »

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