AVC ISCHÉMIQUES

« Actuellement, on doit faire face à trois à quatre alertes d’AVC par jour rien qu’au CHU de Liège », entame le Pr. Paul MEUNIER, chef du Service de Radiodiagnostic du CHU de Liège. Rien qu’au Sart Tilman, 150 cas avérés sont traités chaque année, « mais ce chiffre ne fait qu’augmenter de manière exponentielle ». C’est l’une des raisons qui a motivé le Service de Radiodiagnostic à investir davantage dans le domaine de la neuroradiologie interventionnelle, à l’initiative du Dr Bernard OTTO

De fait, les urgences extrêmes de l’AVC ischémique imposent souvent de réagir dans les 6 heures pour sauver le patient ; « un délai extrêmement court qui suppose une installation adéquate et un personnel soignant spécifiquement formé, disponible de suite, 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 », rappelle le Dr Otto. Un fameux défi, d’autant que les autres activités de la radiologie interventionnelle ne cessent, elles aussi, de gonfler, menaçant de saturer les infrastructures existantes. Pour le neuro-radiologue, il était urgent d’ouvrir une nouvelle infrastructure en région liégeoise pour accueillir cette demande croissante.

Actuellement, on doit faire face à trois à quatre alertes d’AVC par jour rien qu’au CHU de Liège

Pr. Paul Meunier, chef du Service de Radiodiagnostic

Le plateau technique d'imagerie médicale du niveau -2 du Sart Tilman a ainsi été revu et reconstruit afin d'accueillir une nouvelle salle dédiée à la réalisation des procédures radiologiques neuro-interventionnelles. Fonctionnelle depuis le 15 février dernier, le nouveau plateau peut s’enorgueillir d’un équipement de pointe de toute dernière génération, spécifiquement conçu pour la réalisation de procédures neuro-radiologiques et destiné à accueillir en priorité les urgences des AVC ischémiques ainsi que le traitement des anévrismes. 

Pour le Pr. Meunier, cet investissement matériel et humain du CHU de Liège représente « un réel progrès pour une meilleure prise en charge de certaines pathologies telles que l’AVC au sein du réseau hospitalier régional ». 

Qui êtes-vous ?

Qui est le Docteur Bernard Otto ?

Radiologue au Service de Radiodiagnostic du CHU de Liège depuis maintenant quinze ans, Bernard OTTO s’est imposé comme « la pierre angulaire de la radiologie neuro-interventionnelle dans l’équipe », pour reprendre les termes du Pr. Paul Meunier, chef du Service. Diplômé en Médecine en 1984 puis en Radiologie en 1989 à Liège, Bernard Otto a d’abord poursuivi une carrière assez longue au sein du CHR de la Citadelle, entretenant des liens toujours très étroits avec le CHU de Liège. Jusqu’en 2007, où il y sera engagé à temps plein.

CHUchotis du jeudi90-Neurologie interventionnelle-WEB2Jeune radiologue, il s’est d’abord investi exclusivement dans l’imagerie médicale et la neuro-radiologie diagnostiques, pour se spécialiser plus tard dans la radiologie interventionnelle, poussé par l’envie « d’explorer le côté actif, thérapeutique des images, et non plus simplement contemplatif ». Il est singulièrement fasciné par « la relation très étroite entre le symptôme et la localisation anatomique » qui caractérise cette discipline, pour laquelle il se formera à Lille en 2009. Mais surtout, Bernard Otto trouve dans l’interventionnel une dimension humaine fondamentale, « une richesse relationnelle particulière avec le patient, dont la vie ou l’autonomie sont souvent en jeu ».   

Qui est le Professeur Paul Meunier ?

Aujourd’hui chef du Service de Radiodiagnostic du CHU de Liège, c’est au cours de ses études de Médecine que Paul MEUNIER s’est découvert un intérêt pour la radiologie. Un intérêt qui deviendrait bientôt une passion, concrétisée à partir de 1986 par une spécialisation en radiodiagnostic durant deux années au CHR de la Citadelle, suivies de deux autres au CHU de Liège.

CHUchotis du jeudi90-Neurologie interventionnelle-WEB3Paul Meunier s’oriente ensuite vers la radiologie abdominale, qu’il pratique durant plusieurs années à Bruxelles, à Liège et à Libramont avant de revenir au CHU en 2005 comme consultant. Il y développe alors progressivement cette branche spécifique de la radiologie, qui le mènera à diriger l’Unité de Radiologie abdominale dès 2010, puis le Service de Radiodiagnostic à partir de 2013. Depuis, il tente d’y imprimer sa vision de la discipline, qui se doit pour lui « d’être une activité de terrain, intégrée dans les équipes soignantes et la plus proche possible des patients ».

Fusion d’images et 3D : une technologie de haute précision

Soucieux de mettre à disposition des patients du réseau hospitalier liégeois le meilleur équipement possible, le CHU de Liège a investi dans un matériel de toute dernière génération, que le Pr. Meunier voit comme la « ferrari » des tables d’angiographie. Comme l’explique le Dr Otto, la nouvelle table de radiologie interventionnelle est particulièrement adaptée aux procédures neurologiques : « Munie de deux tubes qui tournent autour du patient au lieu d’un seul, elle fournit des images en biplan, ce qui permet de produire une représentation immédiate en 3 dimensions, comparable à une imagerie de type scanner, directement sur la table d’examen ». Le radiologue peut ainsi suivre ses gestes au fur et à mesure de l’intervention et observer l’avancée du traitement avec une grande précision, en temps réel. Pour le Dr Otto, « cette technologie permet aussi un gain de temps précieux, notamment face à une branche artérielle occluse, lorsque chaque minute compte ».

CHUchotis du jeudi90-Neurologie interventionnelle-WEB4De plus, un système de fusion d’images permet d’importer des images réalisées précédemment (lors d’un scanner ou d’une IRM) et de les superposer aux images produites durant l’angiographie : « On peut ainsi naviguer dans l’image et repérer très précisément les lésions et leur localisation dans l’espace », commente le radiologue. Par ailleurs, cette nouvelle technologie s’avère significativement moins irradiante que ses prédécesseurs. Une économie d’irradiation « non négligeable dans un contexte où les patients doivent être régulièrement revus ! ».

Spécialisée en neurologie, la nouvelle salle accueille une grande diversité de procédures interventionnelles

Le Service de Radiodiagnostic a voulu sa nouvelle salle « tournée vers l’urgence et spécialisée en neurologie », notamment pour faire face à une demande croissante. Ses deux vocations principales sont ainsi « l’embolisation des anévrismes cérébraux (en aigu ou en prévention) et les thrombectomies, dans le cadre des urgences extrêmes de l’AVC ischémique », précise le Dr Otto.

CHUchotis du jeudi90-Neurologie interventionnelle-WEB5Mais au-delà de ces priorités, la salle accueille également toutes autres activités de radiologie interventionnelle, neurologiques ou non, urgentes et non urgentes, nécessitant un équipement de pointe. Depuis la ponction de foie jusqu’à la mise en place de gastrostomie, en passant par le traitement d’une tumeur hépatique par radiofréquence, le drainage d’une diverticulite, la mise en place d’un stent dans une artère sclérosée ou encore le traitement d’une tumeur rénale par cryothérapie ; car « l’activité interventionnelle augmente sur tous les plans, et l’ancienne salle ne suffisait clairement plus à couvrir l’ensemble des besoins ».

Une équipe spécialisée disponible 24h/7j en région liégeoise

En cas d’alerte stroke, c’est tout un système complexe qui doit se mettre en branle, impliquant aussi bien les services du 112 que le réseau des hôpitaux primaires et secondaires, le tout dans un délai record, chaque minute passée signifiant un risque supplémentaire de perte irréversible pour le patient. Pour le Dr Otto, c’est un parcours de soin à la mécanique particulièrement rôdée qui doit alors s’enclencher : « D’abord avec l’appel au 112, dont les équipes sont formées à la détection des AVC, et qui peuvent dépêcher des ambulances avec un médecin ou un infirmier dédié. L’hôpital de proximité réalise ensuite en urgence l’évaluation clinique et l’imagerie de base (scanner ou angioscanner et IRM) ».     

« On ne dispose que de 6 heures (parfois jusqu’à 24 heures) entre la survenue des symptômes et le traitement pour préserver une chance de récupération complète sans déficit ni dépendance ».

Si l’alerte se confirme à l’imagerie, « l’hôpital secondaire est immédiatement prévenu, et on pose l’indication d’une fibrinolyse et du geste endovasculaire par téléconsultation ». Le patient doit ensuite être transféré au plus vite dans un hôpital capable de le prendre en charge, « ce qui suppose non seulement une infrastructure dédiée et disponible, mais aussi une équipe médicale compétente, mobilisable à toute heure du jour ou de la nuit ». Grâce au dévouement de ses soignants, le CHU de Liège a ainsi pu mettre en place des tours de garde assurant la disponibilité 24h/7j d’une équipe d’infirmier(ère)s, d’anesthésistes et de quatre neuroradiologues, tous spécifiquement formés à la prise en charge des AVC ischémiques, en collaboration avec les neuroradiologues du CHR Citadelle.

Message aux médecins traitants

Si les Urgences du CHU de Liège doivent gérer trois à quatre alertes stroke chaque jour, c’est d’abord parce que les premiers symptômes sont peu spécifiques, générant une série de fausses alertes, mais aussi parce que la population est davantage informée qu’auparavant, « ce qui est une bonne nouvelle, mais le travail de sensibilisation doit encore se poursuivre tant auprès des patients que des médecins traitants et des services d’urgences ! », estime le Dr Bernard Otto. « L’idée est d’amener un maximum de gens vers ce type de traitements (thrombolyse et thrombectomies). C’est pourquoi nous avons voulu préparer le CHU à cette prise en charge, de manière à augmenter l’équipement lourd du parc hospitalier régional de notre réseau au service de la population ».

63-message médecins-4-WEB1000x500Le spécialiste salue au passage le travail remarquable de collaboration entre les différents intervenants du réseau pour mettre en place un parcours de soins si efficace, « depuis le patient à domicile jusqu’à la table d’intervention. À chaque étape, chacun connaît le bon geste pour gagner du temps. Et sauver des vies ».