Année record pour la Fondation Léon Fredericq

14 Un comité de patients, c’est utile? Réflexions sur l’évolution progressive de la relation soignant-patient COMITE DE PATIENT | LA CHRONIQUE En 1789, dans son « traité élémentaire de chimie», Antoine Lavoisier écrit : «Rien ne se perd. Rien ne se crée. Tout se transforme». Trop souvent, nous ré- pétons cette maxime en omettant de nous interroger quant à sa signification. C’est pourtant ainsi que notre statut de patient en hospitalisation ou en soins ambulatoires est devenu le produit de la « transformation » de la relation du patient au soignant et vice-versa. Il serait donc erroné de faire référence à la « création » d’un Comité de patient alors que notre institution actuelle a vu le jour à la suite d’une « transformation » de la relation entre patients et soignants dans le sens d’une alliance ou d’une co-construction thérapeutique. PAS UNE « CRÉATION » MAIS UNE «TRANSFORMATION » Notre réflexionde cemois sera initiée par cette référence au contexte historique de tout phénomène de société. Pendant de nombreuses années, la relation entre les patients et le système libéral ou institu- tionnel de santé a été déséquilibrée. D’un côté, le patient profane ne maîtrise rien ou pas grand-chose dans le cadre médi- cal. D’un autre, le professionnel de san- té qui dispose de la connaissance et de l’information est susceptible d’imposer ses réponses aux questions que se pose le patient. Cet article vise donc à mettre en évidence l’évolution progressive de la relation soignant-patient. Jusqu’au XVIII e siècle, lamédecine reste en général fondée sur le projet hippocra- tique de la crise de santé sur laquelle le médecin doit formuler tant un diagnos- tic qu’un pronostic lié à une technologie de guérison. À partir du XIXe siècle se met en place une médecine scientifique dans la mesure où elle s’articule sur les principes de base de la médecine expérimentale (1858 - 1877) de Claude Bernard à Paris (où Léon Fredericq a été en post-formation). Ces principes sont élaborés puis appliqués selon le souci non seulement d’observation mais aus- si d’expérimentation, de mesure et de théorisation. En biomédecine, il s’agit d’inventer des outils qui permettent de cerner la maladie avant son expression clinique. La santé apparaît donc comme une correction des déviances du fonc- tionnement de l’organisme du patient. La médecine remet ainsi en cause sa propre évaluation du normal et du pathologique. La relation médecin-patient au sein de laquelle le médecin était responsable de la démarche de soins est définie comme « asymétrique » selon Talcott Parsons en 1951. En 1984, Eliot Freidson a remis en question ce rôle “passif” du patient en mettant en avant l’intérêt de sa participa- tion au sein de la relation thérapeutique. La France (loi Kouchner du 4mars 2002) a légiféré quant au rôle et aux droits des patients dans leur parcours de soins. Définis légalement comme acteurs du système de soins, les patients participent activement à la co-construction théra- peutique avec les équipes médicales et paramédicales grâce à une information éclairée et loyale que leur permet l’accès à leur dossier médical. En Belgique, on décide … de ne pas déci- der. Et, comme on le dit en BasseMeuse, « Lès k’voyeûs rawårdèt ». Néanmoins, avec cette nouvelle législa- tion française, l’expérience du patient est prise en compte et encourage ce dernier à participer à la décision médicale en se voyant reconnaître un droit à l’informa- tion. Logiquement, cette information mena la relation soignant-soigné vers une meilleure adhésion du patient à son traitement. C’est également en 2002 que, plus généralement, la loi belge sur le Droit du Patient viendra concrétiser cette perception de son statut. De façon générale, les soignants ne seront plus les seuls experts de la santé en géné- ral. Au départ du vécu d’une pathologie chronique, le patient peut devenir pa- tient-expert pour lui-même mais aussi patient-ressource pour les autres. OCTOBRE 2015, PREMIÈRE BELGE : LE COMITÉ DE PATIENTS DU CHU DE LIÈGE Le 4 octobre 2015, à l’initiative de la Di- rection Médicale du CHU, sera installé le Comité des Patients du CHU. Composé de 15 membres-patients, en- cadré de 4 représentants associatifs et de représentants institutionnels médi- caux, paramédicaux et psychosociaux, le CP-CHU est coordonné par le service de médiation de l’hôpital. Son rapport annuel d’activités est présenté à l’admi- nistrateur-délégué. L’ADN du CP tiendra toujours dans la rencontre singulière et imprévisible qui se construit autour d’un symptôme, d’une maladie et de la parole. Trois axes d’action et de réflexion sont indispensables : - Axe 1 : Aller vers les autres patients - Axe 2 : Entrer en relation avec le per- sonnel de soins - Axe 3 : Entrer en relation avec l’ins- titution Tenant compte du cadre confinant à l’intimité du patient, toutes les règles de déontologie communément admises se trouvent évidemment être de rigueur. Ainsi n’est-il nul besoin de posséder une quelconque certification académique pour participer aux objectifs d’un CP. Par contre, les tâches qui attendent les membres d’un CP sont essentiellement liées à la réflexion franche et honnête de chacun confronté à une situation re- lationnelle patient-soignant. Nonobstant cette attitude naturelle, il pourra néan- moins s’avérer opportun de participer au titre de consultant (patient-partenaire) dans le cadre d’un certain nombre d’ac- tivités impliquant le personnel soignant désireux de s’initier à cette nouvelle vision de la relation soignant-patient (Patient Safety Officer – Éducation Thé- rapeutique du Patient – etc. …) Si ce type d’engagement vous parle,merci de proposer votre candidature auprès du service demédiation duCHUen adressant votre demande à l’adresse-mail de Ma- dameDOPPAGNE, responsableduCP-CHU (comitedepatients@chuliege.be) Jacques GLAUDE

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